Le 28 mars 2023, l’Association nationale Femmes et Droit a participé aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi no 12, Loi portant sur la réforme du droit de la famille en matière de filiation et visant la protection des enfants nés à la suite d’une agression sexuelle et des personnes victimes de cette agression ainsi que les droits des mères porteuses et des enfants issus d’un projet de grossesse pour autrui. Il s’agit d’un projet de loi provincial au Québec.
Le projet de loi no 12 a été déposé en réaction à l’histoire d’« Océane » (nom fictif) qui a été rapportée dans les médias il y a quelques mois. Océane est tombée enceinte et a eu un enfant après avoir été agressée sexuellement par son colocataire. Son agresseur a été trouvé coupable et a été condamné à la prison mais, malgré cela, il a amené Océane en cour pour demander à être légalement reconnu comme le père de l’enfant. En termes juridiques, il voulait que son « lien de filiation » avec l’enfant soit reconnu. Il a gagné : il n’existait aucune avenue permettant au tribunal de refuser de reconnaitre la filiation. Le ministre de la Justice a promis de changer le droit.
C’est ainsi que nous en sommes arrivé·es au projet de loi no 12 qui, entre autres, permettra à un·e enfant conçu par agression sexuelle de s’opposer à avoir un lien de filiation avec son géniteur. L’Association nationale Femmes et Droit est généralement en faveur du projet de loi, mais nous avons soulevé plusieurs enjeux et questionnements importants:
- Présentement, le projet de loi prévoit que le retrait de la filiation en cas d’agression sexuelle ne puisse se faire que si un tribunal détermine que c’est dans l’intérêt de l’enfant. Nous demandons le retrait de ce critère, parce que nous savons que les tribunaux déterminent souvent à tort qu’il est dans l’intérêt d’un·e enfant d’être auprès d’un père violent.
- Nous nous inquiétons également du fait que des mères qui demandent le retrait de la filiation puissent être trouvées « aliénantes ». En effet, les mères sont souvent accusées d’« aliénation parentale » quand elles tentent de se protéger ou de protéger leur enfant d’un père violent. Nous proposons un amendement qui empêcherait les tribunaux de blâmer la mère dans ces circonstances.
- Finalement, nous savons que les violences sexuelles se produisent souvent en contexte conjugal, et que prouver une agression sexuelle conjugale peut être particulièrement difficile. C’est pourquoi nous proposons l’adoption d’une présomption qui permettrait aux tribunaux de considérer qu’une relation sexuelle qui a lieu dans un contexte de violence conjugale ou de contrôle coercitif est une agression sexuelle.
Vous pouvez visionner notre intervention d’une dizaine de minutes ici. Vous pouvez également télécharger notre mémoire complet en cliquant ici.
